Le candésartan a-t-il un effet sur la progression de la rétinopathie chez le diabétique de type 2 ?

andreane.lavallee.1@ulaval.capierre.lepage-letourneau.1@ulaval.canadia.lihimdi.1@ulaval.caRÉSUMÉObjectifÉvaluer l’efficacité du candésartan quant à la progression ou à la régression de la rétinopathie chez les patients atteints de diabète de type 2.ConceptionEssai clinique randomisé à double insu avec groupe cas-témoins placebo.ContexteÉtude internationale menée dans 309 centres universitaires.ParticipantsL’étude regroupait 1905 patients âgés de 37 à 75 ans, normotendus ou hypertendus traités, ayant un diabète de type 2 et une rétinopathie légère à modérément sévère selon l’échelle de l’étude ETDRS (Early Treatment Diabetic Retinopathy Study)1. L’âge au début de la maladie devait être de 36 ans ou plus.Critères d’exclusion : patients avec oedème maculaire significatif ou rétinopathie diabétique proliférative, patients avec maladie valvulaire cardiaque sténotique, AVC récent ou infarctus du myocarde et patients avec une tension artérielle élevée (>130/85 si non traités pour HTA ou >160/90 si déja traités). Enfin, étaient exclus les patients prenant un inhibiteur du système rénine-angiotensine,donc tous les diabétiques avec albuminurie et ceux ayant une insuffisance rénale significative (créatinine > 110 μmol/L chez la femme et > 130 μmol/L chez l’homme).InterventionsLes participants ont été répartis au hasard en deux groupes : le premier recevait le candésartan à 16 mg die (n = 951) et le deuxième groupe, un placebo (n = 954). Après un mois, la dose a été doublée à 32 mg die.Principales mesures de résultatsLa mesure principale a été le pourcentage de patients ayant eu une progression de la rétinopathie définie comme une augmentation de trois échelons ou plus selon l’échelle de l’ETDRS 1.Les trois mesures secondaires ont été le pourcentage de patients ayant eu une régression de la rétinopathie définie comme une réduction d’au moins trois échelons ou plus à n’importe quelle visite de suivi ou deux échelons ou plus maintenus lors de deux visites consécutives; le changement global du degré de gravité de la rétinopathie; enfin, le pourcentage de patients ayant développé une rétinopathie proliférative, un oedème maculaire ou les deux complications.Tous les patients ont été suivis pendant un minimum de quatre ans à l’aide de photographies sériées de la rétine afin de déterminer la progression et la régression de la rétinopathie diabétique dans le temps. Les photographies ont été prises au début de l’étude,à six mois, à un an, puis chaque année jusqu’à la fin de l’étude.Celles-ci ont été évaluées par deux équipes indépendantes, àl’insu.RésultatsLe pourcentage de patients montrant une progression de la rétinopathie n’a pas été réduit de façon statistiquement significative :161 participants (17 %) dans le groupe candésartan vs 182 (19 %)pour le groupe placebo, soit un risque relatif de 0,87 (IC 95 % :0,70-1,08).Toutefois, le pourcentage de régression de la rétinopathie a augmenté de façon statistiquement significative : 180 (19 %) pour le groupe candésartan vs 136 (14 %), soit un risque relatif de 1,34(IC 95 % : 1,08-1,68).Aussi, un changement global vers un niveau moins sévère de rétinopathie à la fin de l’étude a été observé plus fréquemment dans le groupe candésartan, comparativement au placebo : rapport de cotes de 1,17 (IC 95 % : 1,05-1,30). Enfin, il n’y a pas eu de différence significative entre les groupes au niveau du développement de la rétinopathie proliférative ou de l’oedème maculaire. Tel qu’attendu, la tension artérielle a été réduite plus fortement dansle groupe traité. Il n’y a pas eu de différence entre les deux groupes en ce qui concerne les effets secondaires observés.ConclusionL’utilisation du candésartan chez le diabétique de type 2 ayant une rétinopathie légère à modérée pourrait favoriser la régression de la rétinopathie, ou au moins ralentir sa progression, surtout aux stades précoces de la maladie.COMMENTAIREPertinence de l’étudeLa maladie oculaire diabétique, incluant la rétinopathie, demeure la cause première de perte de vision et de cécité chez les personnes en âge de travailler. Malgré un usage répandu et une efficacité prouvée du traitement par le laser pour prévenir la perte de vision, cette thérapie comporte des effets délétères, tels que la perte de champ de vision. Il est bien établi que la prise d’un inhibiteur du système rénine-angiotensi ne réduit le risque de néphropathie et de maladie cardiovasculaire chez le diabétique de type 2, mais son rôle spécifique dans la rétinopathie n’avait pas encore été étudié.Importance des résultatsPremièrement, le pourcentage de patients ayant une progression de la rétinopathie n’a pas significativement baissé dans le groupe candésartan(17 % vs 19 %, p = 0,20).Cependant, la régression de la rétinopathie a augmenté de façon statistiquement significative dans ce même groupe (19 % vs 14 %), soit une différence en valeur absolue de 5 % et un nombre de patients à traiter (NNT ) d’environ 20 sur une période de 4 ans. Dans une analyse de sous-groupe, l’augmentation de la régression n’est significative que dans le groupe ayant une rétinopathie légère.Pour ce qui est du changement global du niveau de la rétinopathie à la fin de l’étude par rapport au début, un niveau moins élevé de gravité a été observé dans le groupe candésartan, et ce, de façon significative (rapport de cotes 1,17 p = 0,003). Il est également intéressant de noter que la dose maximale de candésartan a été bientolérée et que les effets secondaires ont été très similaires dans lesdeux groupes.Critique de la méthodologieIl s’agit d’un essai clinique randomisé de bonne qualité méthodologique.Le processus de randomisation et d’assignation est explicite et valable.Les groupes à l’étude sont comparables. Il s’agit principalement de patients âgés en moyenne de 57 ans, ayant un diabète depuis8,8 ans, dont 62 % sont hypertendus et 27 % sont fumeurs.La taille de l’échantillon de cet essai clinique randomisé à double insu est suffisante pour évaluer l’effet du candésartan sur la progression et la régression de la rétinopathie chez les patients souffrant de RDB . Au total, 84 % des patients randomisés ont terminé l’étude etles caractéristiques de ceux qui ont abandonné sont très semblables dans les deux groupes.Il y a respect de l’assignation des patients dans leurs groupes respectifspour l’analyse des résultats. L’analyse a également été faite en ajustant pour les facteurs pronostiques, dont la tension artérielle,sans influence sur les résultats.L’utilisation de photos sériées avec évaluation selon une échelle validée pour déterminer le niveau de gravité de la rétinopathie est un excellent choix.Cependant, les patients ne devaient pas prendre d’inhibiteur du système rénine-angiotensine au début de l’étude, ce qui a limité la sélection aux diabètes pour lesquels il n’y avait pas d’indication connue d’une telle médication. Par ailleurs, on note qu’une proportion plus importante de patients sous placebo a reçu au moins un agent hypotenseur (77 % vs 72 %), dont un inhibiteur du SRA (28 % vs21 %) lors de l’étude, ce qui peut avoir conduit à sous-estimer l’effet du candésartan.Mise en perspective selon l’état des connaissancesLes résultats de la présente étude sont les premiers à démontrer qu’un ARA pourrait avoir un certain effet protecteur sur la rétinopathie.L’étude ne permet cependant pas de déterminer s’il s’agit d’un effet direct ou d’un effet relié à la réduction de la tension artérielle.Deux études antérieures d’envergure2,3 ont montré que la maîtrise de la tension artérielle a un effet significatif sur la diminution de la progression de la rétinopathie. Par ailleurs, les résultats de cette étude tendent à démontrer que le traitement par un ARA est plus bénéfique à un stade relativement précoce de la maladie. Une petite étude antérieure soutient cette suggestion par la non-efficacité du losartan en matière d’oedème maculaire4, celui-ci constituant un stade avancé de la maladie.OphtalmologieArticle de référenceSjølie AK., Klein R., Porta M.,Orchard T., Fuller J., Parving H.H.,et coll. Effect of candesartan onprogression and regression ofretinopathy in type 2 diabetes(DIRECT-Protect 2) : A randomisedplacebo-controlled trial. The Lancet,octobre 2008; 372 : 1385-93.Références1. ETDRS Group. Grading diabeticretinopathy from stereoscopic colorfundus photographs – an extensionof the modified Airlie House classification.ETDRS report number 10.Ophthalmology 1991; 98 :786-806.2. Matthews DR, Stratton IM,Aldington SJ, Holman RR, KohnerEM; UK Prospective DiabetesStudy Group. Risks of progression ofretinopathy and vision loss relatedto tight blood pressure control intype 2 diabetes mellitus : UKPDS69. Arch Ophtalmol 2004; 122 :1631-40.3. Schrier RW, Estacio RO, Esler A,Mehler P. Effects of aggressive bloodpressure control in normotensivetype 2 diabetic patients on albuminuria,retinopathy and strokes.Kidney Int 2002; 61: 1086-97.4. Knudsen ST, Bek T, Poulsen PL,Hove MN, Rehling M, MogensenCE. Effects of losartan on diabeticmaculopathy in type 2 diabeticpatients : A randomized, doublemaskedstudy. J Intern Med 2003;254 : 147-58.

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