L'art de l'autorégulation en médecine

Le système de santé canadien repose sur les idéaux d'accès, d'équité et de qualité des soins. La couverture médicale universelle garantit que les Canadiens et Canadiennes reçoivent les soins nécessaires, mais il incombe aux organismes de réglementation professionnelle, tels que les collèges de médecins et de chirurgiens, de maintenir des normes dans le domaine médical. Les relations d'un médecin avec son organisme de réglementation sont généralement minimes et consistent en des processus de routine tels que le renouvellement des licences, le respect des exigences en matière de formation médicale continue (FMC) et le paiement des cotisations annuelles. Toutefois, cette relation administrative peut prendre une tournure brutale si une plainte officielle est déposée, ce qui peut déclencher une enquête stressante et susceptible d’affecter la carrière.La procédure peut être décourageante. Les plaintes concernant les compétences ou le comportement d'un médecin peuvent émaner de patients, de collègues ou d'institutions, et les enquêtes du Collège peuvent sembler froides et contradictoires.Comme l'indique Doctors of BC sur son site internet, «bien que la plupart des médecins passent toute leur carrière sans faire l'objet d'un contrôle, si cela se produit, ça peut être une expérience stressante, perturbante et accablante». Les médecins peuvent également être désignés au hasard (pour une évaluation) par le biais d'une sélection en fonction des risques s'ils travaillent en solo ou s'ils sont âgés de 70 ans ou plus.» La simple idée de recevoir une «lettre du Collège» peut susciter une profonde anxiété chez tout médecin, car elle signifie le début d'un processus qui pourrait avoir de graves conséquences.À lire aussi: La réalité de la médecine familiale a changé. Le système de santé doit suivreDans ce contexte, il est essentiel de reconnaître que l'autorégulation ne consiste pas seulement à respecter les normes minimales requises par le Collège, c'est-à-dire à ne pas «se faire prendre». Il s'agit de se fixer des normes plus élevées, d'adopter un état d'esprit d'amélioration continue, de développement professionnel et de soins centrés sur le patient. C'est l'essence même de l'autorégulation individuelle – la responsabilité du médecin de veiller à ce que sa pratique évolue en même temps que le paysage des soins de santé, qui est en constante mutation. Mais à quoi cela ressemble-t-il dans la pratique?L'apprentissage continu, plus qu'un simple mot à la modeLe concept d'apprentissage tout au long de la vie est souvent évoqué lors des entretiens dans les facultés de médecine, avec des étudiants enthousiastes désireux de faire part de leur engagement en faveur de la formation continue. Cependant, pour les médecins expérimentés, la réalité de l'apprentissage continu est bien plus difficile, en particulier lorsque les années de pratique s'accumulent. Avec le temps, il est facile de perdre l'ardeur et la motivation initiales pour acquérir de nouvelles connaissances. Se tenir au courant des dernières recherches médicales, des nouveaux produits pharmaceutiques et des progrès dans les soins aux patients exige de l'autodiscipline, du dévouement et du temps – des ressources qui peuvent souvent sembler rares.Pour les praticiens très occupés, il peut être difficile de trouver l'énergie nécessaire pour consulter les dernières revues ou participer à des activités de FMC après une journée épuisante passée à voir des patients. Pourtant, un véritable apprenant permanent sait que l'apprentissage ne s'arrête pas à l'éducation formelle ou au respect des exigences de la FMC. Il s'agit plutôt de rester curieux, de s'adapter en permanence et d'intégrer de nouvelles connaissances dans la pratique, quelle que soit l'ancienneté du médecin. L'apprentissage tout au long de la vie ne consiste pas seulement à suivre des heures d'enseignement formel; il s'agit de garder l'esprit ouvert et de viser l'excellence dans les soins aux patients.L'accident évité de justesse et le manque de connaissancesMême les médecins les plus expérimentés rencontrent parfois des situations où les lacunes en matière de connaissances deviennent flagrantes. En médecine, un «accident évité de justesse» – lorsqu'un oubli ou un manque d'information aurait pu causer un préjudice à un patient – peut être une puissante source de motivation pour progresser. Bien qu'inconfortables, ces moments sont souvent les expériences d'apprentissage les plus précieuses. Les médecins sont généralement prompts à rechercher les connaissances nécessaires pour combler ces lacunes, en particulier lorsque les résultats pour le patient sont en jeu. À lire aussi: C’est normal de faire une erreurCependant, le véritable danger réside dans le fait de ne pas savoir ce que l'on ne sait pas. Il est facile de se concentrer sur les domaines dans lesquels nous sommes déjà sûrs de nous et de continuer à apprendre dans ces domaines familiers. Mais les connaissances médicales sont vastes et personne ne peut être expert en tout. Les médecins évitent souvent de se confronter à leur ignorance dans des domaines moins familiers, ce qui peut être dangereux. Le défi consiste à identifier ces lacunes dans les connaissances et à être suffisamment humble pour rechercher des opportunités d'apprentissage, même si cela implique de sortir de sa zone de confort.L'introspection systématique: un processus continuL'une des pierres angulaires de l'autorégulation est la capacité à faire son autocritique, c'est-à-dire à évaluer régulièrement sa pratique, à reconnaître les domaines, à améliorer et à élaborer des stratégies pour remédier aux lacunes. Il ne suffit pas de s'appuyer uniquement sur les commentaires de ses pairs ou sur l'examen occasionnel d'un organisme de réglementation; un médecin doit s'engager dans un processus constant d'introspection.L'introspection systématique peut être difficile, car elle exige de reconnaître les défauts et les domaines de faiblesse. Par exemple, certains médecins peuvent avoir du mal à admettre qu'ils ont des difficultés avec un aspect particulier des soins aux patients ou qu'ils ont pris du retard dans certains domaines de la connaissance médicale. Pourtant, ce n'est qu'à travers cette réflexion honnête qu'une véritable croissance peut se produire.L'une des approches consiste à adopter un plan d'apprentissage structuré, tel que le Plan d'apprentissage professionnel (PAP) proposé par le Collège des médecins de famille du Canada. Cet outil aide les médecins à fixer des objectifs pour leur développement continu, en veillant à ce qu'ils restent responsables vis-à-vis d'eux-mêmes et de leurs patients. En outre, la participation à des clubs de lecture, à des évaluations par les pairs, à des consultations entre médecins ou même à des discussions informelles fréquentes avec des collègues peut contribuer à créer un environnement d'apprentissage et d'amélioration continus.Plans d'amélioration de la qualitéLes plans d'amélioration de la qualité sont devenus de plus en plus populaires dans le domaine médical comme moyen d’actionner le changement et d'améliorer les résultats pour les patients. Pour de nombreux médecins, en particulier ceux qui ne travaillent pas dans un cadre universitaire, le lancement d'un plan d'amélioration de la qualité peut être l'un des moyens les plus gratifiants de s'engager dans l’autorégulation. Ces plans ne nécessitent pas de recherche à grande échelle ou de publication universitaire, mais se concentrent plutôt sur des améliorations mineures et gérables au sein d'une pratique ou d'un cadre clinique.Les plans d'amélioration de la qualité permettent aux médecins d'appliquer directement ce qu'ils ont appris, d'apporter des améliorations tangibles à leur pratique et de s'engager de manière significative auprès de leurs collègues et de leur personnel. Même des changements modestes, lorsqu'ils sont bien planifiés et exécutés, peuvent avoir un impact significatif sur les soins aux patients. Les médecins qui s'engagent dans des projets d'amélioration de la qualité les trouvent souvent motivants, car ils leur donnent le sentiment d'avoir un but et conduisent à des améliorations réelles et mesurables de la prestation des soins de santé.Loyauté envers la santé et le bien-être personnelsL'art de l'autorégulation individuelle ne se limite pas au développement professionnel; il s'étend au bien-être personnel. Les médecins qui prennent soin de leur santé – en maintenant une alimentation équilibrée, en faisant régulièrement de l'exercice, en gérant leur stress et en se reposant suffisamment – sont plus susceptibles d'être efficaces sur le plan professionnel. Comme le dit l’adage, une carrière médicale est un marathon, pas un sprint, et elle exige de l'endurance, de la résistance et un entraînement régulier.À lire aussi: Accro à la médecineUn médecin qui néglige sa propre santé risque l'épuisement professionnel, de mauvais résultats pour ses patients et l'insatisfaction personnelle. D'autre part, le maintien d'un mode de vie sain garantit que le médecin dispose de l'énergie physique et mentale nécessaire pour répondre aux exigences de sa profession et continuer à fournir des soins de haute qualité sur le long terme. Un engagement en faveur du bien-être personnel est également un engagement envers les patients, car il démontre la capacité du médecin à supporter les défis physiques et mentaux de la profession et à maintenir des performances optimales.S'efforcer de faire plus que le minimum syndicalÀ une époque où le système de santé est de plus en plus sollicité, l'autorégulation n'a jamais été aussi cruciale. C'est grâce à cet engagement en faveur de l'amélioration continue que les médecins pourront non seulement respecter les normes fixées par leurs organismes de réglementation, mais aussi les dépasser, en s'assurant qu'ils fournissent toujours les meilleurs soins possibles à leurs patients.Le chemin vers l'excellence est semé d'embûches, mais avec du dévouement et un état d'esprit de croissance constante, les médecins peuvent le parcourir avec succès. Le Dr Ted Jablonski est un artiste de la scène et un écrivain qui a quitté son cabinet de médecine familiale pour se consacrer à la médecine sexuelle et à la santé des personnes transgenres dans le sud de l'Alberta, tout en gardant les deux pieds dans les tranchées de la première ligne des soins primaires aigus.

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