iPad à l’Hôpital d’Ottawa: une petite idée qui s’est transformée en idée de génie

Certaines idées a priori fantaisistes peuvent se révéler sensationnelles une fois mises en place. Voici l’histoire d’une petite idée qui s’est transformée en idée de génie.Il y a quelques années, le chef du service des technologies de l’information de l’Hôpital d’Ottawa, Dale Potter, passait de longues soirées à tenter de trouver des façons d’utiliser les TI pour améliorer les soins aux patients.Deux questions lui trottaient en tête:1) Comment amener les médecins à saisir les ordonnances sans qu’ils soient forcés de revenir sans cesse au poste de soins infirmiers?2) Est-ce qu’on ne faciliterait pas leur travail s’ils pouvaient consulter les dossiers de santé électronique sur un iPad?«Il a pris trop de café», a d’abord commenté un des collègues auquel il a présenté son projet. Le directeur des finances a également trouvé l’idée farfelue, a indiqué le chef des systèmes d’information médicale de l’hôpital, le Dr Glen Geiger, à l’occasion d’un congrès Informatique Santé organisé par l’AQESSS à Québec.Dans un contexte de restrictions budgétaires, M. Potter s’est montré assez persuasif auprès de la direction pour obtenir le feu vert lui permettant de lancer un projet pilote. De retour d’un congrès en mars 2010, il a discrètement fait entrer les trois premiers iPad dans l’hôpital. Le «virus» était installé, il s’est propagé et n’a plus jamais quitté le CH.AvantagesL’introduction de cette tablette a complètement transformé la façon de travailler des médecins de l’hôpital. L’iPad leur permet d’accéder à tous les renseignements à jour dont ils ont besoin, à l’endroit et au moment où ils en ont besoin. Il permet donc d’éviter beaucoup de déplacements inutiles, ce qui leur fait épargner un temps précieux.Le iPad présente plusieurs avantages par rapport à l’ordinateur fixe qui se trouve dans des postes de travail. Léger, il amène l’information à l’intérieur même de la chambre des patients, qui bénéficient d’une plus grande instantanéité en matière de soins. Les médecins peuvent livrer les informations et les résultats à leur chevet sans avoir besoin de les imprimer.«Comme on voit [les informations] à l’écran, c’est comme si [le médecin et le patient] parcouraient un livre ensemble», a indiqué le Dr Geiger.Pour cette raison, l’iPad a immédiatement favorisé un meilleur dialogue entre les deux parties. Les visites sont plus longues, mais plus efficaces.Des patients ont indiqué que le fait que l’équipe soignante soit en mesure d’être à leurs côtés pour leur montrer les résultats de leurs examens leur donnait une plus grande confiance et étayait le sentiment qu’ils avaient de participer à la prise de décisions concernant leurs soins.RépartitionAprès le succès retentissant du projet pilote, les premiers iPad ont été distribués selon un ordre prioritaire: les médecins traitant ont reçu une tablette avec carte SIM et les résidents un iPad avec Wi-Fi. À ce jour, 1000 médecins exerçant à l’hôpital ont été formés pour utiliser cette technologie dans le cadre de leur pratique clinique.En février 2011, lors du prolongement du programme pilote, 300 nouveaux iPad ont été acquis et, trois mois plus tard, la direction a autorisé l’achat de 1500 autres.AméliorationsDepuis l'instauration de son programme, les applications disponibles sur ces iPad n’ont jamais cessé d’être améliorées. En juin 2010, la première version du visualisateur permettait aux médecins de consulter trois éléments lors de leurs déplacements dans l’hôpital: les résultats de laboratoire, les rapports d’imagerie diagnostique, les listes des médicaments actifs.Deux autres volets ont été rapidement ajoutés: les images PACS et le visualisateur de documents et de profils pharmaceutiques.L’autre grande innovation est survenue le 27 mars 2012 quand l’Hôpital d’Ottawa est devenu le premier hôpital au monde à lancer le système de saisie informatisée des ordonnances (SSIO) sur iPad. Le SSIO permet aux médecins et résidents d’entrer des ordonnances en tout temps, peu importe où ils se trouvent.Un autre grand pas est à venir. Les fonctions de prescription électronique de médicaments et de registre électronique d’administration des médicaments (e-MAR) seront ajoutées lors d’un prochain exerciceSécuritéDes mesures ont été prises afin d’assurer une sécurité maximale lors de l’utilisation de ces iPad. L’application clinique ne stocke sur l’appareil aucune donnée liée aux patients. Les appareils tournant sous iOS possèdent un système de chiffrement matériel. Des hackers éthiques ont même été embauchés afin de relever tout défaut de sécurité ou d’exploitation.ÉconomiesL’argent demeure toujours le principal frein au développement de ce genre d’outils dans les hôpitaux. L’investissement était élevé. Il fallait donc de solides résultats pour en justifier les coûts.L’implantation de cette technologie va se traduire par des économies majeures. Ainsi, il ne sera pratiquement plus nécessaire de former le personnel infirmier à la transcription des ordonnances électroniques. L’établissement a aussi reçu beaucoup moins de demandes d’installations de postes de travail.Au total, l’hôpital estime que les iPad devraient lui permettre d’épargner 400 000$ – de l’argent qui, affirme-t-on, sera retourné dans les soins directs aux patients.«L’implantation de ces iPad s’est révélée beaucoup plus efficace que ce à quoi on s’attendait. Ça vaut tout l’argent qu’on a dépensé. Le coût des appareils est minime par rapport à leur impact», a commenté le Dr Geiger avec satisfaction.Le médecin a souligné qu’il fallait toutefois beaucoup de leadership de la part de la direction pour se lancer dans une pareille entreprise, même si les résultats sont au rendez-vous.Poursuite du déploiementMaintenant que la technologie a fait ses preuves, le déploiement du iPad se poursuit. Le nombre d’appareils en circulation a dépassé 3000 et s’achemine 4000.Après les médecins, les résidents, les pharmaciens et les infirmières de liaison, les infirmières, les ergothérapeutes et les physiothérapeutes en seront tous munis. On songe même à en fournir aux patients dans des salles à des fins de divertissement.La réussite de l’implantation et du fonctionnement du iPad en milieu hospitalier à Ottawa a fait école et plusieurs établissements songent aujourd’hui à l’imiter. C’est notamment le cas de l’Hôpital St-Mary à Montréal.Dans le cadre d’un petit sondage mené lors de la présentation du Dr Geiger à Québec, 70% des répondants ont estimé que les cliniciens étaient prêts à intégrer la tablette électronique dans leur pratique.À lire aussiLes patients adoptent rapidement la prise de rendez-vous en ligne, selon le président de Bonjour-SantéPrise de rendez-vous en ligne: un gain de productivité de 25% pour un médecin de famille de MontréalL’appareil mobile à l’urgence de l’Hôpital de Verdun, une expérience concluante

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