Groupe canadien de recherche en soins intensifs: 25 ans, et 50 projets de recherche en cours

Le Groupe canadien de recherche en soins intensifs (CCCTG, selon l’acronyme anglais) célèbre cette année ses 25 ans. «Notre réseau a pour objectif ultime de mieux aider le patient, car on veut amener la recherche et l’évaluation à son chevet», dit à Profession Santé le Dr Paul Hébert, président du Groupe.Le CCGTC rassemble des chercheurs et des cliniciens, qui, souvent, assument ces deux fonctions. «Nous sommes en train de former la 3e génération de chercheurs; la vingtaine de membres du début sont devenus aujourd’hui environ 300. Divers pays ont copié le modèle de notre réseau collaboratif, dont l’Australie, la Grande-Bretagne, la Scandinavie. Une vingtaine de réseaux internationaux font aujourd’hui comme nous», poursuit le Dr Hébert. Le Groupe s’engage également dans le mentorat de jeunes chercheurs et futurs leaders en soins intensifs.Efficaces, mais coûteuxChaque année, plus de 150 000 Canadiens sont admis aux soins intensifs, à la suite d’un traumatisme grave, d’une septicémie ou d’une sérieuse atteinte à un organe vital. Ces soins sont devenus très efficaces, mais ils coûtent aussi très cher, explique Nicolay Ferrari, Ph D., directeur exécutif du Groupe. On estime ainsi qu’ils peuvent absorber jusqu’à 1%, voire plus, du PIB d’un pays. Dans un hôpital universitaire comme le Centre universitaire de l’Université de Montréal, ce type de soins accapare de 7 à 10% du budget total.Le Dr Paul Hébert est également chef du département de médecine du CHUM (16 services, 300 médecins). Voici comment, dans le nouveau CHUM (773 lits), se répartissent les lits qui dépendent de ce département:- 66 lits en soins intensifs- 9 lits pour les grands brûlés- 24 lits pour les soins intermédiaires- 20 lits pour les soins coronariensDes lits coûteux donc, très technos, les patients y consommant en moyenne de 5 à 10 médicaments.ÉthiqueAu-delà du volet technique, bien des préoccupations sociales animent les chercheurs du Groupe. La majorité des citoyens, par exemple, souhaitent mourir à domicile, rappelle le médecin. Dans les faits, cependant, la plupart des gens meurent à l’hôpital et dans le tiers des cas environ, ils se retrouvent aux soins intensifs. Là, environ 1 personne sur 5, voire 1 sur 3, parmi celles qui aboutissent aux soins intensifs y décèdent, et celles qui survivent sont souvent très abîmées.Le Dr Hébert évoque par ailleurs «les attentes incroyables» que nourrit le public – surtout les baby-boomers – à l’endroit de la médecine. Il mentionne aussi les cas assez fréquents d’enfants éloignés par la distance et qui, se sentant soudain coupables face à leur vieille mère hospitalisée aux soins intensifs et plutôt délaissée, font pression sur l’équipe médicale pour que tout soit tenté pour prolonger sa vie. Tout, même ce qui paraît déraisonnable en regard de la situation clinique réelle de la dame en question.Ces réalités soulèvent l’épineux problème des soins de vie, et la nécessaire réflexion éthique qu’ils impliquent. «En fait, l’un de nos dilemmes peut se résumer à la question suivante: "Comment nous assurer que c’est bien la bonne personne qui est soignée aux soins intensifs?"» poursuit le Dr Hébert.Qualité de vieL’une des tâches du Groupe consiste aussi à trouver des façons de minimiser l’impact des soins intensifs, de réduire les dommages physiques et psychologiques qu’ils peuvent entraîner pour les patients (bruit, impact sur les sens, routine jour/nuit perturbée entravant la qualité du sommeil, effets négatifs d’une médication intensive, etc.).Le Groupe mène quelque 50 projets de recherche, traitant surtout de ces questions pratico-pratiques. Il s’agit de rehausser la qualité des soins pour un grand traumatisé, par exemple, ou pour un blessé gravement atteint au cœur, au cerveau, aux poumons ou aux reins.Le CCCTG en quelques chiffres- 25 ans d’existence, en 2014- 350 professionnels de la santé- 60 unités de soins intensifs, dans 6 provinces canadiennes- 50 programmes en cours- environ 140 articles publiés, dont 15 dans le New England Journal of Medicine.- 60 millions $ en subventions.Avec l’aide d’autres groupes de recherche en soins intensifs, le CCCTG a participé à la création d’un forum mondial pour les chercheurs intensivistes (InFACT). Ce regroupement promeut la collaboration entre les groupes de recherche en soins intensifs de divers pays.Quelques exemples de projets de recherche, sur la page suivanteQuelques exemples de projets de rechercheParmi la cinquantaine de projets sur lesquels travaille le Groupe canadien de recherche en soins intensifs, en voici quelques-uns, résumés sous forme de questions.Combien de sang utiliser pour la transfusion des enfants et adultes gravement malades? Le Groupe a mené deux études, l’une chez les adultes et l’autre, chez les enfants gravement malades. Toutes deux ont démontré que les taux de mortalité et de défaillance d’un organe étaient comparables, et qu’il y avait moins de complications si l’on donnait moins de sang. Des audits de la pratique médicale menés à la suite de ces études auprès de médecins canadiens, américains et britanniques, ont mis en évidence ce changement de pratique.De plus, on a incorporé des seuils transfusionnels plus bas dans les directives et indicateurs de qualité à l’échelle mondiale. Finalement, une approche plus restrictive de la pratique des transfusions est devenue une norme dans les unités en soins intensifs, en médecine générale et en anesthésiologie.Devrions-nous utiliser une nouvelle forme de ventilation mécanique (oscillation) chez les patients souffrant de difficultés respiratoires critiques?Le Groupe vient de terminer une étude qui démontre que ce traitement cause plus de torts que de bien. Ces résultats devraient entraîner une diminution du recours à l’oscillation pour sauver les poumons en défaillance.Devrions-nous utiliser une technique de refroidissement pour les enfants et adolescents souffrant d’un traumatisme crânien sévère?Le Groupe a complété une étude suggérant que cette technique, prometteuse mais laborieuse, ne permettait pas d’améliorer les résultats de santé chez ces jeunes à la suite de blessures graves. La technique n’est plus employée pour les traumatismes crâniens.Quels sont les meilleurs traitements pour prévenir la formation de caillots de sang aux jambes et aux poumons? Une récente étude du Groupe comparait un nouvel anticoagulant, plus dispendieux, nommé enoxaparin, à un anticoagulant plus commun et beaucoup moins cher, l’héparine. Menée dans plusieurs pays, l’étude randomisée a démontré que le nouveau traitement prévenait plus efficacement la formation de caillots, sans toutefois causer des saignements critiques. Plusieurs directives et protocoles à travers le monde recommandent désormais le nouvel anticoagulant, plus sécuritaire et plus efficace.Devrions-nous adopter un contrôle plus strict des niveaux de sucre dans le sang des patients gravement malades?Une série de petites études ont suggéré qu’un contrôle plus strict des niveaux de sucre dans le sang par l’administration d’insuline intraveineuse pouvait sauver plus de vies chez les patients se trouvant dans un état critique. Les chercheurs n’étaient pas convaincus que les coûts supplémentaires et les conséquences de cette approche (épisodes plus fréquents d’hypoglycémie) étaient justifiés.Ils ont donc débuté une vaste étude, avec des collègues australiens. Elle a permis de conclure que cette approche augmentait les complications et n’avait pas de réel bénéfice quant au nombre de vies sauvées. «Nous avons donc arrêté cette pratique qui était largement adoptée au Canada». Source: Groupe canadien de recherche en soins intensifs.

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