Grossesses à faible risque: doit-on faire une échographie au troisième trimestre?

De plus en plus de patientes demandent une échographie du troisième trimestre, mais celle-ci est-elle bénéfique pour les patientes dont la grossesse est à faible risque? En l'absence de lignes directrices, que doivent faire les médecins? Les échographies réalisées au cours du troisième trimestre peuvent permettre de détecter des fœtus de petite taille par rapport à l'âge gestationnel et d'identifier un risque de mort fœtale intra-utérine (mortinaissance). Toutefois, elles peuvent également augmenter le nombre de faux positifs et conduire à des investigations injustifiées. Des experts ont débattu de l'utilité des échographies du troisième trimestre lors de la conférence annuelle de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, qui s'est tenue à Ottawa au début du mois de juin. Bien qu'ils aient discuté des avantages et des inconvénients, ils ont conclu que les patientes demanderaient des échographies du troisième trimestre, quels qu'en soient les avantages. Quels sont les avantages? Le principal avantage des échographies du troisième trimestre est qu'elles permettent de détecter les bébés petits ou grands pour l'âge gestationnel, a déclaré la Dre Anne-Maude Morency, professeure adjointe au département d'obstétrique et de gynécologie de l'Université McGill et spécialiste de la médecine fœto-maternelle à l'Hôpital Royal Victoria. Cela aide les parents et les médecins à se préparer aux morbidités liées aux bébés nés dans les percentiles de croissance supérieurs ou inférieurs. Par exemple, l'équipe de soins prénatals peut contacter des spécialistes en pédiatrie avant l'accouchement, décider du meilleur type d'accouchement ou de son moment. L'échographie du troisième trimestre permet également de détecter un retard de croissance intra-utérin, un facteur de risque de mort fœtale intra-utérine. Un essai randomisé mené aux Pays-Bas a montré que les fœtus de petite taille par rapport à l'âge gestationnel étaient détectés beaucoup plus souvent dans le groupe ayant bénéficié d'une échographie systématique du troisième trimestre que dans le groupe ayant reçu les soins habituels. Ces échographies peuvent également détecter des anomalies fœtales qui ne se développent qu'au cours du troisième trimestre, comme les kystes ovariens ou abdominaux, la ventriculomégalie ou l'achondroplasie, a indiqué la Dre Morency. Selon cette dernière, de plus en plus de patientes présentant une grossesse à faible risque demandent une échographie du troisième trimestre. «C’est rassurant pour les patientes. Elles peuvent entre autres confirmer le sexe de l'enfant, ce qui n'est pas important pour nous, mais qui l'est pour elles.» «Au final, il n'y a pas de lignes directrices claires ni de consensus, alors pourquoi ne pas le faire?», ajoute-t-elle. Quels sont les inconvénients? Les échographies du troisième trimestre concernant les grossesses à faible risque peuvent entraîner une série de tests et d'évaluations de suivi qui ne sont peut-être pas nécessaires, a pointé le Dr Venu Jain, professeur agrégé de médecine fœto-maternelle à l'Université de l'Alberta. Elles peuvent également entraîner l'anxiété des parents et une «médicalisation accrue des grossesses normales», a-t-il ajouté. Un certain nombre d'études et d'essais, y compris celui réalisé aux Pays-Bas, ont montré que si les échographies du troisième trimestre permettent de détecter des anomalies et des fœtus trop petits pour l'âge gestationnel, il n'y a pas de différence dans les résultats si on les compare à ceux obtenus avec les soins habituels, a indiqué le Dr Jain. Une autre préoccupation est que les échographies du troisième trimestre dans les grossesses à faible risque ne constituent pas une bonne utilisation des ressources de santé. Le fait d'offrir cette possibilité à toutes les patientes pourrait signifier que les ressources d'imagerie sont limitées pour d'autres patientes, comme celles souffrant d'endométriose. «Je dirais que ce n'est pas justifiable», a partagé le médecin. Bien faire les choses Quels que soient les avantages et les inconvénients, les patientes ayant une grossesse à faible risque continuent de demander des échographies au troisième trimestre. «Heureusement, ou malheureusement, c'est déjà le cas, a affirmé le Dr Jain. Si cela doit se poursuivre, il est peut-être possible d'améliorer les pratiques.» Si les professionnels des soins prénataux choisissent de proposer à leurs patientes à faible risque des échographies du troisième trimestre, ils doivent le faire de manière appropriée, a soutenu le Dr Jain. Tout est dans le timing Les échographies doivent être réalisées entre la 34e et la 37e semaine, car la 32e semaine est trop précoce pour détecter les fœtus trop petits pour l'âge gestationnel ou les retards de croissance intra-utérine, explique la Dre Morency. Une échographie à 37 semaines ou plus tard serait trop tardive pour étudier les anomalies ou planifier l'accouchement. Les évaluations à faire pour les grossesses à faible risque Une échographie devrait comprendre des mesures de la croissance, du volume du liquide amniotique, de la présentation du fœtus et de l'anatomie de base (par exemple, le cerveau, le cœur, le diaphragme, l'estomac, les reins, la vessie), a spécifié la Dre Morency. Choisir avec soin Canada note que les médecins ne devraient pas demander un profil biophysique ou un Doppler foetal pour les échographies du troisième trimestre dans les grossesses à faible risque. Malgré cette recommandation, certains médecins continuent de les demander. Les données présentées par le Dr Jain suggèrent que 41% des obstétriciens et des gynécologues demanderaient une échographie du troisième trimestre pour les grossesses à faible risque, contre 12% des médecins de famille. Parmi ces derniers, plus de 25% demanderaient un score de profil biophysique et plus de 10% prescriraient un Doppler fœtal même en l'absence d'indication claire. Les données proviennent d'une enquête menée auprès de 223 obstétriciens et gynécologues et de 283 médecins de famille. Selon les Drs Jain et Morency, le fait qu’un Doppler fœtal et un profil biophysique ne soient pas nécessaires doit être communiqué aux collègues en radiologie. Combien d'échographies au cours du troisième trimestre? Si les médecins choisissent de proposer une échographie au cours du troisième trimestre à leurs patientes présentant une grossesse à faible risque, une seule évaluation est nécessaire. Les échographies multiples ne présentent aucun avantage supplémentaire, selon une étude réalisée en 2020 sur les échographies du troisième trimestre dans les grossesses à faible risque, publiée dans l'American Journal of Obstetrics and Gynecology Maternal-Fetal Medicine. Communiquer avec les patientes La Dre Morency fait remarquer qu'expliquer pourquoi ne pas demander une échographie du troisième trimestre prend plus de temps que d'effectuer l'échographie elle-même. Mais si une échographie est proposée, les patientes doivent être informées des raisons pour lesquelles elle est effectuée et de la signification des résultats. «Cela nécessite des conseils, comme pour tout ce que nous faisons, a ajouté la Dre Morency. Ce n'est pas tout le monde qui comprend ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons. Certains patients pensent qu'il s'agit simplement de confirmer leur sexe.» Selon le Dr Jain, une documentation à l'intention des patients portant sur les avantages et les inconvénients d'une échographie du troisième trimestre pour les grossesses à faible risque permettrait de préparer les patients à la conversation.

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