Efficacité et innocuité des anticholinergiques et des ß-agonistes inhalés dans le traitement de la MPOC

Thuy-Tien Nguyen-Dang thuy-tien.nguyen-dang.1@ulaval.ca UMF Laval Article de référence Salpeter SR, Buckley NS, Salpeter EE. Meta-analysis : Anticholinergics, but not ß-agonists, Reduce Severe Exacerbations and Respiratory Mortality in COPD. Journal of General Internal Medicine, octobre 2006; vol. 21 : 1011-9. RÉSUMÉ Objectif Comparer l’efficacité et l’innocuité d’un traitement par bronchodilatateur utilisé sur base régulière(anticholinergiques inhalés ou ß-agonistes inhalés)en termes de prévention des exacerbations graves et de la mortalité respiratoire. Conception Revue systématique avec méta-analyse. Source des données La recherche des études s’est effectuée à l’aide de Medline, Embase, Cochrane Databases, en incluant les études de langue étrangère. Une recherche a été effectuée parmi les documents de la Food and Drug Administration(FDA)et parmi les références des articles. Sélection des études Toutes les études sélectionnées devaient être des essais cliniques randomisés comparant un bronchodilatateur(ß-agoniste ou anticholinergique)au placebo ou des bronchodilatateurs entre eux. La durée minimale de l’étude devait être de trois mois, et celle-ci devait rapporter au moins un événement d’intérêt(exacerbation grave ou décès d’origine respiratoire). Ont été exclus : études d’une durée de moins de trois mois, essai clinique non randomisé, essais cliniques non comparatifs, études portant à la fois sur l’asthme et la maladie pulmonaire obstructive chronique(MPOC)et celles où il y avait absence d’information concernant les exacerbations graves ou les décès d’origine respiratoire. Extraction des données Deux chercheurs ont extrait les données de chacune des études; les discordances entre chercheurs étaient résolues par consensus. On a évalué la qualité et la validité de chaque étude à l’aide d’un score de 0 à 3 points pour chacun des quatre critères suivants : processus de randomisation, respect de l’insu, qualité du suivi et analyse selon l’intention de traitement. Synthèse des données Sur 5000 études, 86 étaient pertinentes, dont 22 ont été sélectionnées pour la méta-analyse. Les principales mesures de la méta-analyse étaient le risque relatif(RR)d’exacerbations graves ayant nécessité un retrait de l’étude ou une hospitalisation, et le risque de mortalité d’origine respiratoire selon les comparateurs suivants : anticholinergiques vs placebo, ß-agonistes vs placebo et ß-agonistes vs anticholinergiques. Dans les études comparant les anticholinergiques(à courte ou à longue durée d’action)au placebo, on note une diminution significative des exacerbations graves(RR 0,67 IC 95 % 0,53 à 0,86)ainsi qu’une réduction statistiquement significative de la mortalité respiratoire(RR 0,27 IC 95 % 0,09 à 0,81). Dans les études comparant les ß-agonistes(à courte ou à longue durée d’action)au placebo, on note une augmentation non significative des exacerbations graves(RR 1,08 IC 95 % 0,61 à 1,95), mais une augmentation significative de la mortalité respiratoire(RR 2,47 IC 95 % 1,12 à 5,45). Dans les études comparant directement anticholinergiques et ß-agonistes, on note une augmentation significative des exacerbations graves associées aux ß-agonistes(RR 1,95 IC 95 % 1,39 à 2,93)et une augmentation non significative de la mortalité respiratoire(RR 6,91 IC 95 % 0,85 à 55,97). Enfin, le traitement combiné n’apporte pas d’avantages significatifs en ce qui concerne la prévention des exacerbations et de la mortalité respiratoire Conclusion Les anticholinergiques sont plus efficaces et plus sécuritaires que les ß-agonistes pour prévenir les exacerbations graves et la mortalité d’origine respiratoire chez les patients souffrant de MPOC. COMMENTAIRE Pertinence de l’étude La MPOC est une maladie très fréquente dans notre pratique quotidienne; elle est une source de morbidité et de mortalité importante chez les gens qui en sont atteints. Il se prescrit actuellement plus de ß-agonistes que d’anticholinergiques sur une base régulière pour la diminution des symptômes et la prévention des exacerbations. Devrait-on favoriser les uns plus que les autres ? Laquelle de ces deux démarches médicamenteuses a le meilleur impact en termes de morbidité et de mortalité ? Le traitement combiné est-il plus avantageux ? Importance des résultats Cette méta-analyse suggère que les anticholinergiques diminuent les exacerbations graves et la mortalité respiratoire par rapport au placebo, alors que les ß-agonistes, eux, diminuent les exacerbations ayant occasionné un retrait des études, mais non les exacerbations nécessitant une hospitalisation, tout en étant associés à une augmentation de la mortalité respiratoire. Les ß-agonistes sont également associés à un risque de près du double d’exacerbations graves(5,1 % vs 2,6 %)comparativement aux anticholinergiques. mais non les exacerbations nécessitant une hospitalisation, tout en étant associés à une augmentation de la mortalité respiratoire. Les ß-agonistes sont également associés à un risque de près du double d’exacerbations graves(5,1 % vs 2,6 %)comparativement aux anticholinergiques. Enfin, l’addition de ß-agonistes aux anticholinergiques n’entraîne pas de bénéfices supplémentaires quant aux exacerbations et à la mortalité. Critique de la méthodologie Globalement, cette méta-analyse a été réalisée de façon rigoureuse. La recherche des études a été exhaustive, mais l’étude la plus récente datait tout de même de 2003. Les auteurs ont eu le souci de vérifier le biais de publication. Les critères d’inclusion et d’exclusion des études étaient explicites, adéquats et vérifiés par plus d’un auteur. Le nombre d’études analysées(22)et celui de patients inclus(15 276)étaient d’importance. Il s’agit principalement d’études de monothérapie portant sur des patients âgés en moyenne de 60 à 65 ans, et souffrant de MPOC de gravité modérée(volume expiratoire maximal par seconde [VEMS] moyen de 1,3 L)et d’une durée moyenne de 20 mois. Fait à noter : près de la moitié des patients prenaient également un corticostéroïde en inhalation. Les études sélectionnées semblaient être de bonne qualité dans l’ensemble, bien que les scores de validité pour chaque étude n’aient pas été rapportés de façon précise par les auteurs. L’analyse statistique a été faite selon le modèle à effets fixes après qu’on eut constaté l’absence d’hétérogénéité entre les études. Les principales limitations de cette méta-analyse étaient le nombre limité d’études, en particulier celles comparant directement anticholinergiques et ß-agonistes; le nombre peu élevé d’événements d’intérêt(en particulier la mortalité); et les faiblesses du point de vue méthodologique(pourcentage élevé d’abandons, surtout dans les groupes placebo). Il aurait été aussi intéressant d’avoir une analyse de sensibilité selon la qualité méthodologique des études ou encore selon l’usage de bronchodilatateurs à courte vs à longue durée d’action, ou selon l’usage ou non en association de corticostéroïdes en inhalation. Mise en perspective selon l’état des connaissances Dans la plupart des guides de pratiques concernant la MPOC, les ß-agonistes et les anticholinergiques sont sur un pied d’égalité pour le contrôle des symptômes. Cette méta-analyse soulève une interrogation préoccupante par rapport à l’innocuité des ß-agonistes à longue action lorsque utilisés seuls. Toutefois, une récente étude 1 d’importance rapporte plutôt un impact favorable des ß-agonistes à longue action utilisés seuls ou en combinaison avec des corticostéroïdes inhalés sur la mortalité globale chez des patients souffrant de MPOC grave. Référence 1. Calverley PMA, Anderson JA, Celli B, et coll. Salmeterol and fluticasone propionate and survival in chronic obstructive pulmonary disease. N Engl J Med 2007; 356 : 775-89. Tous les textes de Critique et pratique sur Internet http://machaon.fmed.ulaval.ca/medecine/cetp

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