Docteur, puis-je faire de l'activité physique intense après un infarctus ?

Activité physique intense post-infarctusAux États-Unis, 3 hommes sur 1000 de 35 à 44 ans sont atteints de maladie cardiovasculaire athérosclérotique (MCVA)1. On observe également qu’en moyenne 30 % des individus de cette catégorie d’âge participent à des activités physiques variées2. Bien que beaucoup pratiquent des activités physiques modérées, certains peuvent aspirer à la compétition ou à l’entraînement d’intensité élevée. Selon l’American College of Sports Medicine (ACSM), une activité dite élevée doit être effectuée à un minimum de 70 % de la fréquence cardiaque (FC) maximale ou à 60 % de la FC ou de la VO2 de réserve3. Certains sports, tels que le hockey sur glace, le vélo sur route, le jogging ou la natation, peuvent facilement permettre d’atteindre cette zone d’intensité. Il est naturel de s’interroger sur les dangers de la pratique d’un sport de haute intensité chez des personnes ayant subi un infarctus du myocarde.Risques potentiels Lors d’activités intenses sans supervision, le risque de mort subite et d’infarctus peut être multiplié jusqu’à 100 pour une population connue de MCVA4. Il faut toutefois noter que ce taux est extrêmement bas lorsque l’exercice est supervisé et pratiqué régulièrement5.Ce sont principalement les arythmies, plus susceptibles de survenir dans le cadre de cet entraînement, qui sont à l’origine de ces risques. La pratique de ce type d’activité cause une augmentation des catécholamines qui, éventuellement, vont favoriser l’adhésion des plaquettes sanguines et s’avérer thrombotiques. Dans une moindre proportion, il est tout aussi important de s’intéresser aux variations électrolytiques dues à la transpiration, à une mauvaise hydratation et à la prise de médicaments antihypertenseurs6. De plus, l’augmentation de la fréquence cardiaque et du mouvement des artères coronaires provoquée par l’effort physique peut accroître le risque de rupture des plaques athéromateuses5.En outre, le désir de réaliser des performances extraordinaires ou de perdre du poids rapidement mène parfois à consommer des substances dopantes qui peuvent affecter le travail du myocarde et ainsi accroître les risques de récidive. Il est donc important de conscientiser les jeunes cardiaques aux risques des produits en vente libre dans certains centres sportifs.Bien que des risques soient présents lors de l’entraînement de haute intensité, celui-ci présente de nombreux avantages pour les patients cardiaques.Bienfaits de la pratique de l’activité physique à haute intensité La pratique d’une activité physique à haute intensité est associée à des bienfaits plus importants pour la santé que celle qui est pratiquée à une intensité moyenne ou faible. En effet, la pratique d’une activité intense peut diminuer plusieurs facteurs de risque de maladie cardiovasculaire athérosclérotique. L’amélioration de la condition physique par un entraînement progressif repose sur deux principes simples : 1) la spécificité; 2) la surcharge. Il faut donc atteindre un certain seuil d’intensité pour provoquer une amélioration de la capacité. Une étude de grande envergure, portant sur une période de 19 ans, a montré qu’une augmentation de la capacité aérobie d’un seul MET* a le potentiel de diminuer la mortalité de toutes causes chez des patients post-infarctus7. Une régression de la plaque athéromateuse a aussi été observée chez des patients atteints d’une MCVA ayant une dépense énergétique supérieure à 2200 kcal/sem8.Quand prescrire la haute intensité A. Stratification du risque faibleLa pratique d’un sport de compétition est possible pour les patients cardiaques à faible risque en demeurant dans des zones qui se situent à 10 bpm sous la fréquence cardiaque maximale mesurée à l’aide d’une épreuve d’effort. Il faut cependant se souvenir que ces recommandations sont pour le moins prudentes et que l’entraînement à des fréquences cardiaques supérieures n’a pas été étudié.Les individus atteints d’une maladie coronarienne ischémique sont considérés comme étant à faible risque si les conditions suivantes sont présentes : Capacité à l’exercice normale selon l’âge et le sexe; Absence d’ischémie durant l’épreuve d’effort; Fraction d’éjection de repos > 50 %; Absence d’arythmie ventriculaire au repos et avec un Holter de 24 heures; Absence de sténose significative des artères coronaires principales à l’angiographie; Présence de moins de deux facteurs de risque contrôlés; Âge < 55 ans6.* Le MET (équivalent métabolique) est une unité de mesure de l’intensité de l’activité physique.1 MET = repos complet3 à 5 MET = marche ou marche rapide7 à 9 MET = jogging11 à 13 MET = jouer au hockey sur glaceB. Progression et régularité Puisque les incidents surviennent plus fréquemment dans des populations non entraînées, il est recommandé de commencer un programme par un entraînement d’intensité moyenne et d’augmenter progressivement l’intensité jusqu’au niveau souhaité10. D’ailleurs, avant d’intégrer une activité à intensité élevée, le professionnel doit s’assurer que le patient pratique régulièrement une activité physique depuis trois à six mois6.C. Sécurité Les personnes à risque de maladie cardiovasculaire qui s’entraînent intensément doivent connaître les symptômes et le protocole d’urgence afin d’être en mesure de réagir adéquatement en cas de récidive.En somme, le risque de récidive d’IM demeure très minime chez les sujets pratiquant des activités physiques de haute intensité ou chez les sportifs de haut niveau, à condition qu’ils soient à faible risque et qu’ils s’entraînent régulièrement et progressivement. Cette habitude de vie s’avère même bénéfique pour réduire la plaque athéromateuse, contrôler le poids et maîtriser la glycémie, la tension artérielle et le bilan lipidique. Une rencontre avec un kinésiologue est recommandée afin d’assurer une progression adéquate et d’optimiser les performances sportives.1. Rosamond W, Flegal K, Furie K et coll. Heart disease and stroke statistics 2008 update: a report from the American Heart Disease statistics commitee and stroke statistics subcommitte. Circulation, 2008;117:e25-e146.2. Statistique Canada: Participation aux activités sportives selon le sexe, 1998.3. ACSM’s Resource Manuel for Guidelines for Exercise Testing and Prescription, 5e édition, Lippincott Williams et Wilkins, 2006:340.4. Cobb LA, Weaver WD. Exercise: a risk for sudden death in patients with coronary heart disease. J Am Coll Cardiol, 1986;7:215-19.5. ACSM’s Guidelines For Exercise Testing and Prescription, 7e édition. Lippincott Williams et Wilkins, 2006:10-15.6. Borjesson M, Assanelli D, Carré F et coll. ESC Study Group of Sports Cardiology: Recommendations for participation in leisure-time physical activity and competitive sports for patients with ischemic heart disease. Eur J Cardiovas Prev Rehabil, 2006;13:137-49.7. Dorn J, Naughton J, Imamura D et coll. Results of multicentre randomized clinical trial and long-term survival in myocardial infarction patients: the National Exercise and Heart Disease Project (NEHDP). Circulation, 1999;100:1764-69.8. Warburton DER, Whiteny NC, Bredin SSD et coll. REVIEW: Health benefits of physical activity: the evidence. CMAJ, 2006;174 (6):801-9.9. Thompson PD, Buchner D, Pina II et coll. Exercise and Physical Activity in the Prevention and Treatment of Atherosclerotic Cardiovascular Disease. A Statement from the Council on Clinical Cardiology and the Council on Nutrition, Physical Activity and Metabolism. Circulation, 2003;107:3109-16.10. Mittleman MA, Maclure M, Tofler GH et coll. Triggering of acute myocardial infarction by heavy physical exertion. Protection againts triggering by regular exertion. Determinants of myocardial infarction. JAMA, 1999;182:1731-36.* B.Sc. Kinésiologie. ACSM (Certified Clinical Exercise Specialist)marieandree_cossette@ssss.gouv.qc.ca

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