Des injections de botox pour soulager les dysménorrhées sévères et le budget en santé

Jusqu’à 16% des femmes en âge de se reproduire souffrent de dysménorrhées sévères et des études antérieures ont montré que l’effet myorelaxant de la toxine botulique pouvait soulager ces patientes en cas d’échec au traitement de première intention (analgésiques et thérapie hormonale). Une nouvelle étude, initiée en France à l’Université d’Aix-Marseille puis finalisée à l’Université Laval, vient pour sa part démontrer que cette approche pourrait aussi réduire les coûts de leur prise en charge.«Actuellement, les injections de botox restent un traitement expérimental. Elles ne sont pas indiquées pour les dysménorrhées sévères et ne sont donc pas remboursées par le système public de santé, en France comme au Québec», signale le premier auteur de l’étude publiée dans le Journal of Gynecology Obstetrics and Human Reproduction, Jean Martial Kouame, qui espère que ses travaux contribueront à changer les choses. Dans cette perspective, «l’équipe en France finalise un essai clinique randomisé auprès de 300 patientes et nous sommes en train de voir si on peut en lancer un aussi ici», indique le stagiaire postdoctoral en économie de la santé au sein du Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval.À consulter: Douleurs menstruelles: moins de boissons gazeuses et plus de caféLe projet a commencé à la clinique Axium du Centre de recherche en santé de la femme d’Aix-en-Provence, où les cliniciens sont partis de la prémisse que le mécanisme d’action de la toxine botulique pourrait avoir un effet bénéfique chez les patientes présentant des menstruations douloureuses. Ils ont étayé leur hypothèse à l’aide d’une étude pilote menée auprès de 100 femmes faisant partie de la patientèle de la clinique. Étude à laquelle Jean Martial Kouame a contribué dans le cadre de son doctorat en statistique et économétrie appliquée à la santé.Ces patientes en échec thérapeutique prenaient des antalgiques de niveau 2 et 3 (anti-inflammatoires, opioïdes) et/ou un traitement spécifique des douleurs neuropathiques (duloxétine, venlafaxine) et/ou des traitements hormonaux (progestatifs et/ou œstrogènes) associés à une prise en charge cognitivo-comportementale. Avec leur accord, les cliniciens-chercheurs leur ont injecté 200 unités de Botox dans le muscle utérin par hystéroscopie. Résultat: «ces femmes ont connu une diminution importante de leurs douleurs menstruelles. Chez certaines, ces douleurs ont complètement disparu et il n’y a pas eu de rechute pendant plus d’un an. Leur qualité de vie, incluant leur vie sexuelle, a considérablement augmenté», résume Jean Martial Kouame, le pharmacien de formation ajoutant que l’injection au Botox a également été associée à une réduction de la consommation de soins de santé.Des économies substantiellesCes femmes vivent souvent de l’errance médicale qui les amène à consulter de nombreux médecins et d’autres professionnels de la santé dans le but de trouver un remède à leurs maux. Comme les médicaments qu’on leur prescrit sont peu efficaces, elles doivent continuellement changer de médication, explique le postdoctorant. «Tout cela occasionne des coûts directs pour le système de santé auxquels s’ajoutent les coûts indirects liés aux absences au travail et à la baisse de productivité.»Supervisé par l’équipe de Jason Robert Guertin, professeur à la Faculté de médecine de l’Université Laval, le volet québécois de l’étude a consisté à évaluer ces coûts à l’aide d’un modèle pharmacoéconomique qui a permis de comparer ceux du traitement classique des dysménorrhées sévères à ceux des injections de Botox. Les estimations et calculs ont été effectués dans un contexte français, mais ils pourraient s'appliquer au Québec, estime Jean Martial Kouame. Ne manquez pas: Innovation: soulager les douleurs menstruellesAprès un an, le traitement à la toxine botulique entraînerait des économies de l’ordre de 1650 euros (2500$) par patiente. Au bout de 10 ans, on parle d’économies atteignant plus de 13 000 euros (20 000$). «Un traitement au botox pour dysménorrhée sévère coûte environ 300 euros (450$), mais en raison de son efficacité et de la durée du soulagement qu’il procure, il coûte moins cher que la prise continue de médicaments», conclut le chercheur.RéférenceJean Martial Kouame, Jason Robert Guertin, Éric Bautrant, Christine Levêque, Carole Siani. Modelling the cost effectiveness and budget impact of uterine botulinum toxin injections versus conventional treatment in severe dysmenorrhoea: A French perspective. Journal of Gynecology Obstetrics and Human Reproduction. Avril 2025. DOI: 10.1016/j.jogoh.2025.102912

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