Démission d’un médecin arrêté: L’urgence de l’hôpital de Lachute se trouve en sérieuse difficulté

L’urgence de l’hôpital de Lachute se retrouve en sérieuse difficulté à la suite de la démission du médecin de garde, le Dr Jeffrey Sirzyk , qui a été arrêté, menotté et détenu dans une voiture de police pendant 15 minutes par deux policiers de la Sûreté du Québec le 27 février parce qu’il n’avait pas avisé et justifié auprès de l’un des deux agents sa décision de transférer à l’Hôpital Sainte-Justine un enfant de deux mois chez qui il avait découvert une fracture à une jambe.Le Dr Sirzyk travaillait de façon intermittente à l’hôpital de Lachute depuis plusieurs années et il avait déjà été chef de l’urgence. Traumatisé par ces événements, il a démissionné de son poste, ce qui place cette urgence régionale dans le pétrin parce qu’elle a déjà perdu deux autres médecins ces dernières semaines pour cause de santé. Avec la démission du Dr Sirzyk , elle se retrouve maintenant avec trois urgentologues en moins. En outre, une infirmière qui était sur place lors de l’arrestation, et qui a elle aussi été ébranlée par cette affaire, a pris une semaine d’arrêt de travail.«Nous nous retrouvons en sérieuse carence d’effectifs médicaux, a commenté le président du CSSS Argenteuil à Profession Santé. Nous cherchons de l’aide afin de trouver des médecins pour remplir nos quarts de travail. Grâce à la sympathie de médecins de la région et de médecins dépanneurs, vendredi dernier, nous avions réussi à éviter les bris de services, mais nous sommes toujours sur la corde raide. Nous avons atteint le fond.»Plaqué au murPar ailleurs, nous en avons appris davantage sur les détails de l’arrestation musclée de l’urgentologue. Le Dr Sirzyk a été arrêté dans son bureau. Les caméras de surveillance de l’hôpital montrent que le médecin a été amené dans le corridor et assez fortement plaqué contre le mur avant d’être menotté les mains dans le dos. Par la suite, il a été conduit dans la voiture des deux policiers et y est resté pendant une quinzaine de minutes. Ce serait grâce à l’intervention du directeur adjoint de la SQ de Lachute appelé sur les lieux par la direction de l’hôpital qu’il a été finalement relâché.«Tous les gyrophares étaient allumés, on se serait cru au Far-West», ont déploré les dirigeants de l’établissement en commentant la scène.La santé des patients de l'urgence n’a été nullement menacée durant sa détention, car l’urgentologue qui prenait la relève du Dr Sirzyk à 20 heures venait d’entreprendre son service. Néanmoins, la question que soulèvent nombre de médecins scandalisés par cette arrestation reste entière : que serait-il advenu si l’urgentologue avait été détenu hors de l’hôpital sans qu’il y ait un autre médecin présent sur les lieux et qu’une urgence majeure survienne à l’intérieur?Jeudi dernier, la direction du CSSS d’Argenteuil a indiqué que ce policier, qui avait déjà été perçu comme agressif et menaçant au téléphone, avait fait preuve d’un comportement inutilement violent à son arrivée sur les lieux. Une infirmière qui a demandé aux policiers de lâcher le Dr Sirzyk durant son arrestation s’est fait dire par l’un des deux agents qu’elle serait la deuxième à se faire embarquer si elle s’en mêlait.Cet agent de la Sûreté du Québec du poste de Lachute n’était pas connu du personnel de l’hôpital de Lachute. Le collègue qui l’accompagnait était toutefois un visage familier. Selon le directeur général du CSSS et le président du CMDP de l’hôpital, le Dr Gilles Durocher, les rapports entre les policiers de la SQ de Lachute et l’hôpital avaient toujours été excellents, voire exceptionnels. On ne comprend donc pas quelle mouche a piqué le policier instigateur de cette arrestation.Les dirigeants de l’hôpital ont estimé lors d’un entretien avec Profession santé que le policier avait fait preuve d’amateurisme et que les deux agents «s’étaient comportés comme de parfaits ignorants». Leur attitude, ont-ils dit, dénotait une ignorance vis-à-vis du travail du médecin, qui ne pouvait pas leur donner d’informations parce qu’il était tenu par le secret professionnel. La direction de l’établissement s’est dit fière que son équipe médicale «ait protégé l’information et n’ait pas cédé à des gros bras, même policiers, dans une urgence au Québec».Arrestation incompréhensibleLe président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), le Dr Louis Godin, était en vacances en Floride lors de ces événements, mais il a été avisé par son bureau de l’arrestation et de la détention du Dr Sirzyk. En 30 ans de pratique, a-t-il dit à Profession Santé lors d’une conversation téléphonique depuis la Floride, il n’a jamais rien vu de pareil et il estime que cette arrestation était totalement inappropriée.Cette affaire a soulevé plusieurs questions chez des médecins au sujet de la confidentialité des informations vis-à-vis des policiers qui les demandent. Dans le cas du Dr Sirzyk, a indiqué le Dr Godin, il semble qu’il aurait respecté les exigences de la Loi. La FMOQ a rappelé que les médecins ne peuvent en aucune circonstance divulguer des informations confidentielles, même aux policiers. Il existe toutefois quelques exceptions: si le patient l’autorise à les révéler, si la sécurité d’un enfant peut être compromise, lorsqu’il y a blessures par armes à feu ou lorsqu’il y a ordonnance émanant d’un tribunal.Dans le cas de Lachute, les policiers ont arrêté et détenu le Dr Sirzyk sans mandat, ce qui a amené le directeur général de la SQ à réclamer une enquête interne sur cette affaire. La FMOQ a indiqué qu’elle entendait être solidaire du médecin et qu’elle lui offrira le soutien approprié.

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