Congrès 2009 de l’AQPP - Table ronde : Où s’en va la profession ?

Tel est la conclusion des quatre participants de la table ronde organisée par l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP) lors de son congrès annuel, qui se déroulait les 13 et 14 novembre à Québec. La discussion était animée par l’ex-ministre provinciale et fédérale Liza Frulla.La directrice générale de l’Ordre des pharmaciens du Québec, Manon Lambert, a lancé la discussion en soulignant l’énorme défi qui attend les pharmaciens au cours des prochaines années, notamment à cause du vieillissement de la population, des problèmes d’observance aux traitements et de l’accès limité aux médecins. « On estime qu’il y a chaque année jusqu’à 6000 décès dûs à des erreurs de médication dans les hôpitaux canadiens. Il y a une réelle urgence d’agir. Par sa formation et sa proximité, le pharmacien est le mieux placé pour intervenir sur cet aspect, mais cela ne semble pas partagé par les instances. »Luc Marmen, pharmacien propriétaire à Québec et membre du conseil d’administration de l’AQPP, a abondé dans le même sens que Manon Lambert. « Les nombreux défis auxquels nous faisons face force la profession à se redéfinir. Nous sommes passés d’apothicaires à des distributeurs et nous avons aujourd’hui un rôle de spécialiste du médicament ainsi que de conseiller en matière de santé. Je suis convaincu que nous aurons un rôle de première ligne dans les soins de santé, mais c’est en travaillant ensemble que nous y parviendrons. »Pour Marc Parent, pharmacien à l’Hôpital Saint-François d’Assise du CHUQ à Québec, la redéfinition du rôle des pharmaciens nécessite le rapprochement entre ceux qui exercent en milieu communautaire et en milieu hospitalier. « C’est ainsi que nous pourrons mieux nous intégrer au système de santé, car c’est bien beau de s’autoproclamer comme spécialistes de la pharmacothérapie, encore faut-il être reconnus comme tel par les autres professionnels. »« Les facultés de pharmacie créent des jeunes doués en pharmacothérapie, mais ils travaillent dans des milieux démotivants. Si j’étais doyen d’une faculté, je serais fâché contre les pharmaciens propriétaires qui les embauchent. »– Benoit MorandQuant à Pierre Moreau, doyen de la Faculté de pharmacie de l’Université de Montréal, il a pour sa part rappelé qu’un autre bouleversement majeur transformera la profession : l’arrivée au cours des prochaines années de la médecine personnalisée, incluant notamment la pharmacogénomique. « Les modalités thérapeutiques sont sur le point de changer, a-t-il déclaré. Et j’aimerais que ce soit le pharmacien qui soit l’expert dans ce domaine. » C’est d’ailleurs pour cette raison que la Faculté a créé le Groupe d’action pour la pharmacie personnalisée (GAP), un comité qui a le mandat de se pencher sur cette question.Modifier le discoursLe manque de cohésion dans le discours des différentes associations de pharmaciens est un élément dénoncé par plusieurs pharmaciens de l’auditoire. Cela entrave le développement du nouveau rôle que réclament plusieurs pharmaciens, les confinant à des tâches où leur expertise est moins nécessaire.Liza Frulla a suggéré aux pharmaciens qu’ils cessent de s’éparpiller dans toutes sortes de demandes et qu’ils identifient plutôt les priorités qui font consensus au sein de leur profession. Cela leur permettrait d’être plus convaincants et d’attirer davantage l’attention du gouvernement. « Pour persuader un ministre, vous vous devez d’avoir un discours clair, avec quelques priorités seulement, et de taper sur le même clou. »La présidente de l’OPQ, Diane Lamarre, s’est amenée au micro pour convaincre les pharmaciens d’opter pour un discours plus accrocheur. « L’expression “soins pharmaceutiques”, c’est un langage hermétique qui ne trouve pas écho auprès des décideurs, a-t-elle souligné. Utilisons un discours qui touchent leurs priorités. Si nous disons qu’entre 2008 et 2009 il s’est donné 36 000 ordonnances de contraceptifs oraux d’urgence par les pharmaciens, contrairement à 900 par les médecins, c’est un argument plus convaincant. Comme celui que nous pourrions contribuer au triage ou aux soins à domicile. »« Je demande à ceux qui collaborent régulièrement avec des médecins de les encourager à écrire une lettre au CMQ afin qu’ils soulignent qu’ils ont une meilleure pratique depuis qu’ils travaillent avec vous. »– Manon LambertLe travail de chacunBien que les associations doivent adopter un discours plus rassembleur et préciser leurs priorités, les pharmaciens eux-mêmes doivent transformer leurs pratiques s’ils veulent obtenir la reconnaissance qu’ils réclament. « Une vision sans action, c’est une hallucination », a résumé le pharmacien Bertrand Bolduc.« Il faut être fonceur. Les pharmaciens sont trop timides, a poursuivi Luc Marmen. Nos associations ne peuvent pas être plus fortes que leurs maillons les plus faibles. C’est pour cette raison que nous devons faire front commun ! »« Les facultés de pharmacie créent de jeunes pharmaciens doués en pharmacothérapie, mais ils travaillent dans des milieux démotivants, a pour sa part dénoncé le pharmacien propriétaire Benoit Morand. Si j’étais doyen d’une faculté, je serais fâché contre les pharmaciens propriétaires qui les embauchent. »La directrice générale de l’OPQ a profité de cette table ronde pour lancer un message aux pharmaciens, les invitant à poser un geste concret pour le développement de leur nouveau rôle au sein du système de santé : « Je demande à ceux qui collaborent régulièrement avec des médecins de les encourager à écrire une lettre au Collège des médecins afin qu’ils soulignent qu’ils ont une meilleure pratique depuis qu’ils travaillent avec vous. C’est ainsi que nous pourrons sortir du corporatisme. »

Congrès 2009 de l’AQPP - Table ronde : Où s’en va la profession ?

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes