Aide médicale à mourir: le fédéral accélère la cadence pour faire approuver son projet de loi

C’est après des débats écourtés que le principe du projet de loi fédéral C-14 sur l’aide médicale à mourir a été adopté à 235 voix contre 75 à la Chambre des communes, mercredi. La Cour suprême a donné jusqu’au 6 juin au Parlement canadien pour faire ses devoirs en la matière, et c’est loin d’être gagné.Le projet de loi doit encore subir une étude détaillée devant le Comité de la justice et des droits de la personne, au cours de laquelle il pourrait être amendé, avant de revenir devant la Chambre des communes pour une troisième lecture. Viendra ensuite le passage devant le Sénat.Au total, les députés ont pu débattre 25 heures au sujet du projet de loi, et 84 d’entre eux ont eu l'occasion de s'exprimer. Certains, comme Alexandre Boulerice du NPD, ont regretté de ne pas avoir eu la chance de le faire. Toutefois, les libéraux estimaient que si les débats continuaient il serait impossible de respecter l’échéancier de la Cour suprême, et ont donc déposé une motion d’attribution de temps afin d’imposer un vote dès hier après-midi. Selon les libéraux, «un vide juridique serait intenable».Les libéraux (sauf Robert-Falcon Ouellette), les néo-démocrates (sauf Christine Moore) et les bloquistes ont voté en faveur projet de loi. Les votes conservateurs étaient quant à eux divisés: la majorité des élus ont voté contre, mais une vingtaine a voté pour, parmi eux huit des neuf élus Québécois.Plusieurs points du projet de loi sont remis en cause ou en tout cas discutés. Il s'agit notamment de la restriction aux personnes en fin de vie, la définition même de «fin de vie» qui est considérée dans le C-14 comme «une mort devenue raisonnablement prévisible», ou encore le fait que l’on précise le besoin d’un délai de réflexion de 15 jours entre la demande et son acceptation, tout en ouvrant la porte à des exceptions si un patient risque de mourir avant ce délai.Certains députés réclament par ailleurs qu’il soit clairement stipulé que les professionnels de la santé peuvent se soustraire à toute implication dans l’aide médicale à mourir.Une quinzaine de sénateurs ont, quant à eux, entendu jeudi en comité plusieurs témoins qui ont descendu en flammes le projet de loi C-14. Selon eux, l’adopter sans amendement serait «bien pire» que de n’avoir aucune loi.Un projet de loi anticonstitutionnel?Le Barreau du Québec assure que le projet de loi C-14 ne respecte pas la décision rendue par la Cour suprême du Canada et pourrait donc être contesté.Les avocats d’Ottawa n’ont pas la même interprétation, mais reconnaissent que le projet de loi ne répond pas complètement à l’arrêt Carter. Écarter les personnes qui souffrent mais ne sont pas à l’approche de la mort «pourrait porter atteinte aux droits à la liberté et à la sécurité de la personne», peut-on lire dans un document qui explique le raisonnement derrière le C-14. Reste que c’est le moyen choisi pour offrir «une meilleure protection aux personnes vulnérables».De toute façon, la ministre fédérale de la Justice, Jody Wilson-Raybould, ne veut pas du renvoi de projet de loi devant la Cour suprême du Canada pour s'assurer de sa constitutionnalité. Selon elle, «non seulement ce projet respecte l'arrêt Carter», mais «il résisterait à une contestation constitutionnelle».Elle a d’ailleurs le soutien du premier ministre sur cette question. «Dire qu’il faut qu’on vérifie avec la Cour suprême chaque fois qu’on présente un projet de loi important, c’est enlever la légitimité et l’importance du travail que font les parlementaires et le gouvernement», a souligné Justin Trudeau dernièrement. Sources : Presse Canadienne, Radio-Canada, La Presse et Le Devoir

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