Coupable de négligence après qu'un patient ait mal utilisé un médicament

Si la plainte disciplinaire a été déposée le 7 janvier 2025, les faits reprochés à la pharmacienne Heba Zalat remontent au mois de février 2024. Le patient est un étudiant à la maîtrise résidant en Europe et en visite pour quelques semaines chez sa mère en banlieue de Montréal. Pendant son séjour, il reçoit plusieurs prescriptions en lien avec des traitements pour l’asthme et une intolérance au lactose ainsi que, à la suite d’un diagnostic de condylomes ano-génitaux, une préparation magistrale d’acide trichloroacétique 50-90% dans de l'alcool 70%, à appliquer une fois par semaine durant six semaines.Les ordonnances sont transmises à la pharmacie dans laquelle travaille Heba Zalat et où la mère du patient va depuis plusieurs années. La solution d’acide, devant être préparée par une autre pharmacie, est remise à la pharmacie quelques jours plus tard. L’étiquette apposée sur le flacon de verre et son contenant de plastique ne comportent pas d’avertissement particulier sur la dangerosité du produit.La mère du patient, cliente de longue date, va chercher les médicaments à la place de son fils, qui veut éviter des déplacements inutiles et qui n’a pas de numéro de téléphone québécois fonctionnel. À ce moment, la pharmacienne considère que la mère est très curieuse par rapport à ce produit, ce qui la rend mal à l’aise. Elle sait que le patient ne peut être rejoint par téléphone. Elle demande à la mère si son fils sait comment utiliser le médicament, ce à quoi celle-ci répond par l’affirmative avec assurance. La pharmacienne explique alors avoir été volontairement vague afin de ne pas trahir la confidentialité du patient.Lorsqu’il reçoit la solution d’acide par sa mère, le patient ne trouve aucune fiche explicative accompagnant le produit. Comme il ne voit pas de mise en garde sur l’étiquette de la bouteille, il ne croit pas que le produit soit dangereux. Il presse le contenu d’une pipette sur l’ensemble de ses parties génitales, sans protéger la peau saine de corps gras et sans porter de gants, et frotte la solution avec son autre main. Il panique et crie. Il dit subir «la pire douleur de sa vie».Analyse du ConseilÀ l'égard de l'unique chef de la plante, Heba Zalat enregistre un plaidoyer de non-culpabilité. Le Conseil de discipline déclare toutefois la pharmacienne coupable d’avoir contrevenu aux articles 38 et 77(1) du Code de déontologie, ainsi qu’à l’article 59.2 du Code des professions.L'article 38 impose au pharmacien de fournir à son patient les explications nécessaires à la compréhension et à l’appréciation des services pharmaceutiques qu’il lui fournit. L’article 77(1) précise qu’une négligence dans l’exercice de la profession constitue un acte dérogatoire à la dignité de la profession. Enfin, l’article 59.2 interdit tout acte dérogatoire à l'honneur ou à la dignité de sa profession ou à la discipline des membres de l'Ordre. Le Conseil a affirmé que la pharmacienne «aurait dû, dans les circonstances, refuser de remettre la solution d’acide à la mère et exiger que le patient vienne lui-même la rencontrer pour pouvoir ainsi lui fournir les explications nécessaires.»Les membres pharmaciens du Conseil de discipline ont toutefois exprimé leur désaccord avec la position du plaignant, l’ancien syndic adjoint Bernard Deshaies. Ils étaient d’avis que le traitement devait débuter rapidement et qu’il n’y avait pas lieu de retenir le médicament dans ces circonstances. Le Conseil a déclaré la pharmacienne coupable le 31 juillet 2025. La sanction sera déterminée lors d’une audience subséquente.

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